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Le pire est devant nous


ticle du journal Le Monde du 9 février 2022 par Marie-Guite Dufay Présidente de la région Bourgogne-Franche-Comté .

«Les candidats à la présidentielle devraient armer un plan de relance vigoureux pour tous les métiers du social et du médico-social»


Alors que la conférence des métiers de l’accompagnement va se tenir le 18 février, la présidente de la région Bourgogne-Franche-Comté réclame des propositions de la part des candidats à la présidentielle.

Dans une tribune au «Monde», elle dénonce l’absence de moyen et la catastrophe à venir.


«Le pire est devant nous.» C’est le cri d’alarme qu’ont lancé, en Bourgogne-Franche-Comté, les professionnels du travail social et médico-social. Dans une démarche commune inédite, professionnels, mais aussi représentants de familles, fédérations d’employeurs et bénévoles, se sont coordonnés pour faire entendre leur voix, dans la pure tradition de coopération de notre région. Mais ce cri est national.

C’est le cri de tous ceux sui accompagnent les plus faibles de notre société: personnes âgées , dépendantes , handicapées, enfants placés , migrants, exclus, qui subissent aujourd’hui de plein fouet les conséquences de la crise sanitaire qui a entrainé repli sur soi et montée des

exclusions .

Médiateurs, hommes et femmes de lien, ils ont pris soin des plus fragiles pendant les différentes périodes de confinement, ils ont répondu présent, aux côtés des personnes vulnérables. Ils ont été ensuite impliqués dans la stratégie vaccinale de "l'aller vers" et ont pris part à la politique de lutte contre la pandémie, sans être considérés comme participant à notre politique de santé historiquement hospitalo-centrée.


Abandons de poste

C’est le cri des travailleurs sociaux, qui n’ont pas vu, depuis des années, les moyens affectés à leurs missions évoluer en fonction de leurs besoins, et ce alors que la prochaine étape de la crise ne sera pas sanitaire, mais sociale, voire sociétale, car la société est fragilisée et les précarités relationnelles se sont renforcées. Pour faire face à cette situation inédite, nous avons besoin de métiers de l'humain qui soient forts et prêts à relever les défis à venir.


C’est le cri de tous les travailleurs de l’humain, du lien, qui ont besoin d’être reconnus alors que se multiplient les abandons de poste : on estime à 36 000 le nombre de départs entre le 1 er juin et le 30 septembre 2021, et 30 000 postes vacants sont recensés. Les régions forment les travailleurs de ces secteurs et font la promotion de ces métiers auprès des jeunes en recherche d’orientation ou des demandeurs d’emploi.


Mais jamais nous n’avons été confrontés aux désaffections actuelles. Les formations n’ouvrent pas par manque de candidat. Des apprenants abandonnent après leur stage. Des personnes formées quittent leur emploi. La promesse d’être utile, la conviction d’œuvrer pour le bien commun ne suffisent plus pour des métiers mal reconnus et mal valorisés. Cette désaffection augure donc un déficit de professionnels dans les années à venir: le pire est devant nous .


Les témoignages sont édifiants. Ici, des travailleurs sociaux demandent à être considérés à un niveau de qualification inférieur pour toucher la revalorisation salariale de 183 euros net par mois. Là, ce sont des adultes polyhandicapés qui ont été accueillis en Ehpad, une unité de leur structure spécialisée ayant dû fermer faute de personnel. Certains professionnels du secteur privé non lucratif en viennent à se considérer comme maltraitants du fait de la pénurie de moyens.


Essentiel à la société

Comment ne pas penser à Paulette Guinchard, qui, alors ministre de Lionel Jospin, instaura l’APA (allocation personnalisée d’autonomie) et qui fut la combattante acharnée de la dignité des personnes vulnérables. Sa voix manque aujourd’hui pour rappeler que le développement d’une société se mesure à la façon dont les plus faibles sont traités.


Cette question devrait être centrale dans le débat de la présidentielle.


Le Haut Conseil du travail social fait un travail remarquable d’écoute et de préconisations. Il rendra un livre vert en mars, après la tenue de la très attendue conférence des métiers de l’accompagnement social et médico-social le 18 février.


De premières mesures de revalorisations salariales du Ségur de la santé ont touché l’hôpital, puis les Ehpad, mais une grande partie du secteur médico-social, notamment les professionnels travaillant dans le secteur privé non lucratif, n’a pas été concernée. Ils ont subi les catégorisations entre «santé» et «social», entre «première» et «deuxième ligne», «public» et «privé» non lucratif.


Au-delà de la question salariale, c’est la reconnaissance de ce secteur comme essentiel à notre société qui est en jeu.

Le monde d’après doit être celui de l’humain, celui d’une économie au service de la société et non l’inverse.

De même, il ne suffit pas d'inscrire un cinquième risque de la Sécurité sociale dans la loi, lié à la perte d'autonomie et au handicap et qui s'ajouterait aux quatre branches existantes (maladie, vieillesse, famille, accidents du travail). Il convient maintenant de lui donner corps et ambition, à la hauteur de la République sociale qui devrait nous faire nous tenir ensemble, debout.


Voilà pourquoi le rendez-vous du 18 février est un rendez-vous crucial pour la revalorisation de ces métiers essentiels dans une société qui se veut bienveillante.


Voilà pourquoi il serait bien de voir les candidats rivaliser de propositions pour armer un plan de relance vigoureux pour tous les métiers du social et du médico-social. L'attente est forte et l'enjeu essentiel pour préserver et renforcer les avancées sociales que nous avons conquises. Ne revenons pas en arrière, n'allons pas vers le pire.



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