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"Avez-vous une seule fois franchi l'entrée d'un Ehpad public sans annoncer votre venue,


Monsieur le Président de la République

Palais de l'Élysée

55 rue du Faubourg-Saint-Honoré

75008 PARIS

LRAR

Genève le 28 mars 2018

À Trèbes ou derrière les murs des EHPAD : la barbarie

Monsieur le Président de la République,

Les mots par vous adressés au lieutenant-colonel Beltrame dans la cour des Invalides résonnent dans le cœur de chaque Français. En vous référant tel que vous l’avez fait, aux valeurs de l’homme, ces mots qui vous engagent convoquent dans le même temps une autre forme de barbarie.

Bien dissimulée derrière les murs des EHPAD, une barbarie banalisée, quotidienne, multiforme, intolérable, cultive son avancée. Pour la contrer, aucun cavalier de Patay, aucun valeureux gendarme. Elle a gagné sur tous les fronts. Et l’ennemi insidieux, qui exige de chaque citoyen, un regain de vigilance et de civisme, c’est aussi l’abandon de nos aînés dans l’indifférence et le mépris des dirigeants, la destruction des solidarités par le nouvel obscurantisme technocratique de gestionnaires de tout poil droit issus de sacro saintes administrations dont la France se meurt un peu plus chaque jour.

Si l’engagement pour autrui, le secours porté aux autres, fait grandir et avancer, cet engagement que chacun espère pouvoir encore toucher du doigt chez les militaires, pompiers, policiers, fonctions régaliennes s’il en est, l’étincelle qui anime, mais pour combien de temps encore, l’engagement de soignants malmenés est désormais vacillante, pour ne pas dire éteinte, chez nombre d’entre eux. Et avec eux, c’est bien le socle de la République qui est remis en question.

Si ce pays mérite vraiment qu’on lui donne le meilleur de soi, si l’esprit de résistance est au cœur même de ses gênes, alors, Monsieur le Président, il est à souhaiter de saines et belles batailles. L’armée des blouses blanches en déroute pourra-t-elle longtemps continuer à avancer ?

C’est soutenue par son Président, que Madame Simone VEIL, que vous vous préparez à panthéoniser, a fait grandir la France et gagné le respect des Français. Madame Agnès BUZYN ne dispose vraisemblablement pas de cet appui puisque vous permettez à votre Ministre de laisser perdurer les EHPAD de l’indignité. Cette situation désormais explosive, depuis longtemps dénoncée par les gouvernements précédents, perdure. En dépit des mises en garde reçues, aucune intervention de votre part. Ce faisant, vous entérinez la plus totale et illicite discrimination entre les citoyens. Les personnes accueillies aujourd’hui dans les EHPAD ont relevé cette France de l’après-guerre dans laquelle vous évoluez aujourd’hui. Tous les hauts fonctionnaires devraient sinon l’apprendre, tout au moins le garder à l’esprit. Le jeunisme n’est pas une vertu.

Les EHPAD piétinent les Droits de l’Homme. Le récent rapport parlementaire BORRA/FIAT est sans appel : un ratio soignant/résident de 0,5 n’est plus acceptable. Derrière les murs de ses EHPAD la France persiste à maltraiter honteusement et impunément résidents et personnel tandis que les familles continuent de s’acquitter de soins partiellement dispensés.

Chaque vieillard maltraité dans les EHPAD français, aujourd’hui, en tant que chef, il vous faut en répondre. La procrastination n’est plus de mise. L’omertà doit cesser, et dans l’instant. Les résidents de ces établissements ont droit au respect inconditionnel, à tous les niveaux. Le pays est malade de ses Vieux et l’injure qui leur est faite est un élément déstabilisateur de plus pour la jeunesse en soif d’absolu que vous évoquez.

«Indignez-vous» ! criait Stéphane Hessel, avant de s’éteindre. Voilà fait. Aujourd’hui, les ombres anonymes de tous ces vieillards morts ou souffrants dans l’indignité se dressent et demandent des comptes.

La protection due à nos Anciens n’est pas une variable d’ajustement. Absolue, elle doit le demeurer.

Et pour finir, je me permettrais une question : avez-vous une seule fois franchi l’entrée d’un EHPAD public, et ce, sans annoncer votre venue?

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président de la République, l'expression de ma haute considération.

Jeannine HALDIMANN

Professeur retraité

Proche aidante en EHPAD

Membre de la FNAPAEF

Membre de la Schweizeriche Gesellschaft für Gerontologie SGG

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